Tourner en Sanitas direct

Premier jour de tournage pour le 5ème et dernier film de la série de portraits de femmes engagées du Sanitas « J’y vis, j’agis ! ». Portrait de Fatoumata Gassama, en service civique au 13, Espace Passerelles

Approche du film documentaire

Réaliser un portrait-vidéo et d’une manière générale un documentaire est le résultat d’un cheminement. Dans la richesse et la complexité d’une situation, d’un événement, il y a le parcours et l’histoire singulière d’hommes et de femmes. Ma position en tant que réalisateur sera de me rendre disponible, être à l’écoute, accueillir et accompagner une parole, mais aussi porter une attention aux respirations et aux silences. Je compose généralement par étapes, rencontre d’abord la personne de manière informelle, enregistre uniquement sa voix dans un second temps, et capte des images lorsque le projet est parfois bien avancé. La réalisation est donc progressive, sans qu’elle suive par ailleurs une méthode particulière. Il m’est arrivé sur certains portraits-vidéos d’aborder la personne caméra en main, car la situation s’y prêtait. Je place en tout cas mon travail aux antipodes de reportages télé secs et nerveux, où la frontalité de la caméra ne permet à aucun moment de rentrer en contact avec la personne. Au Sanitas, quartier le plus pauvre de Tours, ce type de fonctionnement est d’autant plus inenvisageable, et la caméra doit d’autant plus s’intégrer à la vie du quartier et se positionner parmi les gens. Ma première expérience de réalisation en 2015 dans ce quartier, me l’avait rappelé, avec un corps filmant ne trouvant pas encore tout à fait sa place, et des jeunes habitants percevant ce malaise et ressentant une provocation dans cette caméra intrusive. Dans ces quartiers dit sensibles, il y a d’autant moins de place à l’artifice et la caméra doit d’autant plus s’ajuster à chaque situation.

Le film doit ainsi pouvoir se construire à travers ses protagonistes, menant la réalisation dans des dimensions/ endroits parfois inattendus. Un portrait ou un documentaire ira chercher le foisonnement de la vie et s’offrir à ses imprévus. Une caméra respectueuse des gens et à qui elle emprunte l’image trouvera par exemple une parenté forte dans le cinéma direct de Jean Rouch avec cette notion de «  caméra stylo  » où le film s’écrit au fur et à mesure et par le réel. 

Cette façon de réaliser m’est très proche. 

Il y a dans les quartiers populaires des ambiances de village que j’ai connu enfant dans ma campagne bretonne. Voila ce que je retrouve, ce qui me réchauffe et ce que je souhaite transmettre par l’intermédiaire de ma caméra et la force véhiculée par l’image.