La métamorphose par le dessin

Adaptation de la nouvelle de Franz KAFKA

Adaptation video de la nouvelle

L’écriture dense et contenue de Kafka, son univers, absurde et étrange, peuvent marquer l’esprit pendant des années.

Pour Laurent Priou, comédien et fondateur de la Compagnie Barroco Théâtre, Franz Kafka représentait un souvenir de lecture qui ne l’avait pas quitté depuis le lycée, il y a trente ans ; c’était quant à moi un univers qui avait profondément nourri mon travail video durant mes années aux Beaux Arts.

La rencontre et l’envie de travailler ensemble a très vite été évidente puisque nous étions également d’accord pour adapter La Métamorphose à travers un phénomène de société auquel nous étions tous les deux sensibles : la communication à distance via les nouvelles technologies. 

    L’idée première avait été d’associer le personnage de Grégor, isolé et rejeté par sa famille suite à une métamorphose inexpliquée, avec les «no life» d’aujourd’hui, addictes aux technologies de communication à distance. Nous avons ensuite pris conscience que la société decrite par Kafka (précarité, conditions de travail, isolement des personnages) était d’une saisissante actualité et participait également à l’adaptation de la nouvelle. 

    L’appartement familiale de la nouvelle a été matérialisé par une structure recevant à la fois trois projections séparées et contenant la chambre et l’espace physique du personnage central. Grégor et sa soeur Grete sont les seuls à être présents physiquement, les autres personnages étant incarnés par les images projetées.

La vidéo n’est pas pour autant illustrative car on a voulu qu’elle contienne aussi son propre questionnement. La mise en scène des personnages-vidéo et la scénographie ont été pensé et travaillé de façon à mettre en avant le médium, l’outil vidéo et les nouvelles technologies de communication qu’il représente. Les video-projecteurs sont accrochés à même la structure, et au bout d’un long bras pour la projection centrale ; les personnages vidéos sont isolés physiquement les uns des autres, et ce sont des casques ou oreillettes qui leur permettent de communiquer entre eux.

La structure, repliée sur elle-même, a une présence à part entière ; et les personnages à l’intérieur apparaissent en proie à cette technologie oppressante.

Les différentes séquences-vidéo ont été pensées et construites dans la même logique d’atmosphère pesante. La délimitation de l’image et de l’espace de vie des personnages correspond aux cadres de projections, et le montage-vidéo hache ou sclérose leurs déplacements.

Seule Grete, par la danse et son désir d’émancipation, parviendra à se détacher de la cellule familiale.

A aucun moment, le spectateur ne doit voir des vidéos isolées, mais des images-organes accrochées et liées à une structure-squelette, dans laquelle Grégor serait le produit d’une lente digestion.